La conjuration de Catilina est un complot qui vise la prise du pouvoir de Rome en 63 av. J.C.; le principal chef de ce complot est le sénateur Lucius Sergius Catilina.
En 63 avant J-C, après une première tentative, Catilina essaie à nouveau de prendre le pouvoir légalement; il se présente à l'élection au consulat mais il échoue à trois reprises. Il décide donc de prendre le pouvoir par la force et de fonder une conjuration visant à éliminer une partie des politiques et à incendier Rome.
Le consul Cicéron apprend la naissance de ce complot et dénonce Catilina au Sénat. Celui-ci quitte Rome pour rejoindre ses compatriotes en Etrurie et trouve la mort en -62 pendant la bataille de Pistoia. Les autres conjurés restés à Rome sont exécutés sur les ordres de Cicéron. Le peuple de Rome lui fait alors un triomphe, mais cela ne l'empêchera pas de partir en exil dans les années suivantes.
Cette conjuration est un événement troublant dans la République en crise. Elle nous est connue par les écrits de Cicéron et de Salluste.
Lors d'une séance du Sénat convoqué par Cicéron, l'orateur prononce devant le Sénat quatre disours contre Catilina. Ces textes correspondent aux quatre étapes de la conjuration, depuis ses préparatifs, jusqu'à sa répression.
Voici l'exorde de la première catilinaire de Cicéron, en latin. L'exorde d'un texte est le préambule de ce dernier :
" Quo usque tandem abutere, Catilina, patientia nostra? quam diu etiam furor iste tuus nos eludet? quem ad
finem sese effrenata iactabit audacia? Nihilne te nocturnum praesidium Palati, nihil urbis uigiliae, nihil timor populi, nihil concursus bonorum omnium, nihil hic munitissimus habendi senatus
locus, nihil horum ora uoltusque mouerunt? Patere tua consilia non sentis, constrictam iam horum omnium scientia teneri coniurationem tuam non uides? Quid proxima, quid superiore nocte
egeris, ubi fueris, quos conuocaueris, quid consilii ceperis, quem nostrum ignorare arbitraris?
O tempora, o mores! Senatus haec intellegit. consul uidet; hic tamen uiuit. Viuit? immo uero etiam in senatum uenit, fit publici consilii particeps, notat et
designat oculis ad caedem unum quemque nostrum. Nos autem fortes uiri satis facere rei publicae uidemur, si istius furorem ac tela uitemus. Ad mortem te, Catilina, duci iussu consulis iam
pridem oportebat, in te conferri pestem, quam tu in nos {omnes iam diu} machinaris. "
Exode de la première catilinaire de Cicéron
Voici la traduction du texte en français:
"Jusqu'où enfin, Catilina, abuseras-tu de notre patience ? Combien de temps encore cette folie qui est la tienne se jouera-t-elle de nous ? Jusqu'où ton audace effrénée se déchaînera-t-elle ? Mais rien ne te fait donc peur ? Ni la garde nocturne du Palatin, ni les rondes de nuit de la ville, ni la crainte du peuple, ni le rassemblement de tous les citoyens, ni ce lieu le plus protégé, dans lequel le sénat tient séance, ni les visages et les regards de ces gens-là ?
Ne sens-tu pas que tes plans sont dévoilés, ne vois-tu pas que ta conjuration est déjà réprimée parce qu'elle est connue de tous ? Penses-tu que ce que tu as fait la nuit dernière, et la précédente, l'endroit où tu étais, les gens que tu as rassemblés, les résolutions que tu as prises, quelqu'un d'entre nous l'ignore ?
O temps ! ô moeurs ! Tous ces complots, le Sénat les connaît, le consul les voit, et Catilina vit encore ! Il vit; que dis-je ? il vient au sénat; il est admis aux conseils de la République; il choisit parmi nous et marque de l'oeil ceux qu'il veut immoler. Et nous, hommes pleins de courage, nous croyons faire assez pour la patrie, si nous évitons sa fureur et ses poignards ! Depuis longtemps, Catilina, le consul aurait dù t'envoyer à la mort, et faire tomber ta tête sous le glaive dont tu veux tous nous frapper."
Le premier paragraphe a été traduit par nos soins et le second par itinera electronica.
Si vous voulez sentir la puissance du discours, écoutez les deux premiers paragraphes de l'exorde de la première Catilinaire de Cicéron dits en prononciation restituée par Maxime :
Et pour télécharger cet enregistrement :
Analysons le texte :
A la première écoute du texte, nous pouvons remarquer la musicalité d'une langue accentuée. Une émotion est produite par le texte. L'action de "movere" est accomplie par l'"actio".
Les mots "senatus", "nihil", "conspirati", "Catilina", "conjuratio" sont mis en évidence. Des sons, des mots reviennent. Le "placere" est produit par les effets de style.
Nous pouvons également repérer beaucoup de questions introduites par le préfixe"qu-". Pour docere, Cicéron utilise des phrases interrogatives. Ce sont des questions rhétoriques. L'orateur montre qu'il s'apprête à prononcer un réquisitoire contre Catilina. Il s'agit ici d'un exorde "ex abrupto" (violent).
Dans la phrase "Combien de temps encore cette folie qui est la tienne se jouera-t-elle de nous ?", Cicéron associe "tuus, nos". D'une part, il isole Catilina, d'autre part, il fait des sénateurs ses alliés. Le mot "furor" est chargé dans la civilisation latine d'une signification littéraire très forte. Cicéron dresse d'emblée un portrait extrêmement sombre de Catilina.
On remarque ensuite une répétition anaphorique de "nihil", qui montre l'indignation du consul et permet de noircir le portrait de Catillina. Cicéron emploie une énumération, une gradation, pour énoncer ces phrases. Son discours suit un mouvement presque cinématographique. L'orateur dénonce le caractère de Catilina et se rallie aux sénateurs.
Il insiste en employant iste et sa valeur péjorative.
L'orateur fait ensuite une répétition anaphorique de nihil qui montre son indignation et permet de noircir encore le portrait de Catilina : il fait une gradation en suivant un mouvement quasi cinématographique : rien ne semble effrayer Catilina. Cicéron lâche alors le motif de l'accusation (conjurationem). Il l'accuse de complot.
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Commentaires: 3
~LatinistEva~ (lundi, 04 novembre 2013 20:00)
Merci beaucoup très intéressant
beau travail!
jean paul (mardi, 26 novembre 2013 08:46)
merci, très bien
latinistjuju (mercredi, 18 décembre 2013 11:47)
merci , excellent site