Ulysse et les sirènes
165 "ἦ τοι ἐγὐ¼ τὰ ἕκαστα λÎγων ἑτάροισι πίφαυσκον·
τόφρα δὐ² καρπαλίμως ἐξίκετο νηῦς ἐυεργὐ´ς
νῆσον Σειρήνοιιν· ἔπειγε γὰρ οὐ–ρος ἀπήμων.
αὐτίκá¾½ ἔπειτá¾½ ἄνεμος μὐ²ν ἐπαÏσατο á¼ δὐ² γαλήνη
ἔπλετο νηνεμίη, κοίμησε δὐ² κÏματα δαίμων.
170 ἀνστάντες δá¾½ ἕταροι νεὐ¸ς á¼±στία μηρÏσαντο
καὶ τὰ μὐ²ν ἐν νηὶ γλαφυρῇ θÎσαν, οá¼± δá¾½ ἐπá¾½ ἐρετμὰ
ἑζόμενοι λεÏκαινον ὐ•δωρ ξεστῇς ἐλάτῃσιν.
αὐτὰρ ἐγὐ¼ κηροῖο μÎγαν τροχὐ¸ν ὐ€ξÎι χαλκá¿·
τυτθὰ διατμήξας χερσὶ στιβαρῇσι πίεζον·
175 αἶψα δá¾½ ἰαίνετο κηρός, ἐπεὶ κÎλετο μεγάλη á¼²ς
Ἠελίου τá¾½ αὐγὐ´ ὐ™περιονίδαο ἄνακτος·
ἑξείης δá¾½ ἑτάροισιν ἐπá¾½ οὐ”ατα πᾶσιν ἄλειψα.
οá¼± δá¾½ ἐν νηί μá¾½ ἔδησαν ὐμοῦ χεῖράς τε πόδας τε
ὐ€ρθὐ¸ν ἐν á¼±στοπÎδῃ, ἐκ δá¾½ αὐτοῦ πείρατá¾½ ἀνῆπτον·
180 αὐτοὶ δá¾½ ἑζόμενοι πολιὐ´ν á¼…λα τÏπτον ἐρετμοῖς.
ἀλλá¾½ ὐ…τε τόσσον ἀπῆμεν ὐ…σον τε γÎγωνε βοήσας,
á¿¥ίμφα διÏŽκοντες, τὰς δá¾½ οὐ λάθεν ὐ κÏαλος νηῦς
ἐγγÏθεν ὐ€ρνυμÎνη, λιγυρὐ´ν δá¾½ ἔντυνον ἀοιδήν·
"á¾½δεῦρá¾½ ἄγá¾½ ἰÏŽν, πολÏαινá¾½ ὐˆδυσεῦ, μÎγα κῦδος Ἀχαιῶν,
185 νῆα κατάστησον, á¼µνα νωιτÎρην ὐ„π ἀκοÏσῃς.
οὐ γάρ πÏŽ τις τῇδε παρήλασε νηὶ μελαίνῃ,
πρίν γá¾½ ἡμÎων μελίγηρυν ἀπὐ¸ στομάτων ὐ„πá¾½ ἀκοῦσαι,
ἀλλá¾½ ὐ… γε τερψάμενος νεῖται καὶ πλείονα ε ἰδÏŽς.
á¼´δμεν γάρ τοι πάνθá¾½ ὐ…σá¾½ ἐνὶ Τροίῃ εὐρείῃ
190 Ἀργεῖοι ΤρῶÎς τε θεῶν ἰότητι μόγησαν,
á¼´δμεν δá¾½, ὐ…σσα γÎνηται ἐπὶ χθονὶ πουλυβοτείρῃ.á¾½
"ὐ£ς φάσαν á¼±εῖσαι ὐ„πα κάλλιμον· αὐτὰρ ἐμὐ¸ν κῆρ
ἤθελá¾½ ἀκουÎμεναι, λῦσαί τá¾½ ἐκÎλευον ἑταίρους
ὐ€φρÏσι νευστάζων· οá¼± δὐ² προπεσόντες ἔρεσσον.
195 αὐτίκα δá¾½ ἀνστάντες Περιμήδης ΕὐρÏλοχός τε
πλείοσί μá¾½ ἐν δεσμοῖσι δÎον μᾶλλόν τε πίεζον.
αὐτὰρ ἐπεὶ δὐ´ τάς γε παρήλασαν, οὐδá¾½ ἔτá¾½ ἔπειτα
φθογγῆς Σειρήνων á¼ κοÏομεν οὐδÎ τá¾½ ἀοιδῆς,
αἶψá¾½ ἀπὐ¸ κηρὐ¸ν ἕλοντο ἐμοὶ ἐρίηρες ἑταῖροι,
[12,200] ὐ…ν σφιν ἐπá¾½ ὐ σὶν ἄλειψá¾½, ἐμÎ τá¾½ ἐκ δεσμῶν ἀνÎλυσαν.
Homère, Odyssée, XII, v.165-200 – Hodoi Elektronikai : http://hodoi.fltr.ucl.ac.be/concordances/homere_odyss12/lecture/4.htm
[165] Et je disais cela à mes compagnons, et, pendant ce temps, la nef bien construite approcha rapidement de l’île des Seirènes, tant le vent favorable nous poussait ; mais il s’apaisa aussitôt, et il fit silence, et un Daimôn assoupit les flots. Alors, mes compagnons, se levant, plièrent les voiles et les déposèrent dans la nef creuse ; et, s’étant assis, ils blanchirent l’eau avec leurs avirons polis. Et je coupai, à l’aide de l’airain tranchant, une grande masse ronde de cire, dont je pressai les morceaux dans mes fortes mains ; et la cire s’amollit, car la chaleur du Roi Hèlios était brûlante, et j’employais une grande force. Et je fermai les oreilles de tous mes compagnons. Et, dans la nef, ils me lièrent avec des cordes, par les pieds et les mains, debout contre le mât. Puis, s’asseyant, ils frappèrent de leurs avirons la mer écumeuse. Et nous approchâmes à la portée de la voix, et la nef rapide, étant proche, fut promptement aperçue par les Seirènes, et elles chantèrent leur chant harmonieux : [184] – Viens, ô illustre Odysseus, grande gloire des Akhaiens. Arrête ta nef, afin d’écouter notre voix. Aucun homme n’a dépassé notre île sur sa nef noire sans écouter notre douce voix ; puis, il s’éloigne, plein de joie, et sachant de nombreuses choses. Nous savons, en effet, tout ce que les Akhaiens et les Troiens ont subi devant la grande Troiè par la volonté des Dieux, et nous savons aussi tout ce qui arrive sur la terre nourricière. Elles chantaient ainsi, faisant résonner leur belle voix, et mon coeur voulait les entendre ; et, en remuant les sourcils, je fis signe à mes compagnons de me détacher ; mais ils agitaient plus ardemment les avirons ; et, aussitôt, Périmèdès et Eurylokhos, se levant, me chargèrent de plus de liens. Après que nous les eûmes dépassées et que nous n’entendîmes plus leur voix et leur chant, mes chers compagnons retirèrent la cire de leurs oreilles et me détachèrent.
L’Odyssée, Homère, livre XII, Leconte de Lisle, trad. http://philoctetes.free.fr/odchant12.htm
165 Tandis que j’apprenais à mes compagnons tous ces détails, nous apercevons l’île des Sirènes ; car notre navire était poussé par un vent favorable. Mais tout à coup le vent s’apaise, le calme se répand dans les airs, et les flots sont assoupis par un dieu. Les rameurs se lèvent, plient les voiles, et les déposent dans le creux navire ; puis ils s’asseyent sur les bancs et font blanchir l’onde de leurs rames polies et brillantes. Aussitôt je tire mon glaive d’airain et je divise en morceaux une grande masse de cire que je presse fortement entre mes mains ; la cire s’amollit en cédant à mes efforts et à la brillante lumière du soleil, fils d’Hypérion, puis j’introduis cette cire dans les oreilles de tous mes guerriers. Ceux-ci m’attachent les pieds et les mains au mât avec de fortes cordes ; ils s’asseyent et frappent de leurs rames la mer blanchissante. Quand, dans sa course rapide, le vaisseau n’est plus éloigné du rivage que de la portée de la voix et qu’il ne peut plus échapper aux regards des Sirènes, ces nymphes font entendre ce chant mélodieux : 184. « Viens, Ulysse, viens, héros fameux, toi la gloire des Achéens ; arrête ici ton navire et prête l’oreille à nos accents. Jamais aucun mortel n’a paru devant ce rivage sans avoir écouté les harmonieux concerts qui s’échappent de nos lèvres. Toujours celui qui a quitté notre plage s’en retourne charmé dans sa patrie et riche de nouvelles connaissances. Nous savons tout ce que, dans les vastes plaines d’Ilion, les Achéens et les Troyens ont souffert par la volonté des dieux. Nous savons aussi tout ce qui arrive sur la terre féconde. » 192. Tel est le chant mélodieux des Sirènes, que mon cœur désirait entendre. Aussitôt fronçant les sourcils, j’ordonne à mes compagnons de me délier ; mais au lieu d’obéir ils secouchent et rament encore avec plus d’ardeur. En même temps Euryloque et Périmède se lèvent, me chargent de nouveaux liens qui me serrent davantage. Quand nous avons laissé derrière nous ces rivages et que nous n’entendons plus la voix des Sirènes, ni leurs accents mélodieux, mes compagnons enlèvent la cire qui bouche leurs oreilles et me dégagent de mes liens.
L’Odyssée, Homère, livre XII, Eugène Barèste, trad. http://remacle.org/bloodwolf/poetes/homere/odyssee/livre12.htm