Depuis le mois de mars dernier, et l’arrêté du 19 mai qui a officialisé la réforme du collège, Mme Najat Vallaud-Belkacem a reçu de nombreuses sollicitations d’enseignants, de parents, d’associations, de personnalités, de citoyens… Ces nombreuses demandes traduisent des questions tout aussi nombreuses au sujet de cette réforme.
Les associations n’ont pas toujours obtenu les rendez-vous que la ministre de l’Education nationale et son équipe leur avaient promis. Leurs questions concrètes se sont soldées par des réponses sur les grands principes de la réforme du collège. Parfois, c’est même une fin de non-recevoir que la ministre leur a opposée. J’en veux pour preuve la réponse devant la commission Education du Sénat, le mercredi 3 juin 2015.
A monsieur DUVERNOIS, sénateur, qui posait la question suivante :
« Pourquoi la DGESCO a-t-elle choisi huit thématiques d’EPI, dont certaines ne sont pas forcément adaptées, alors que le Conseil Supérieur des Programmes (CSP) en proposait dix parfaitement justifiées ? »
Madame Vallaud-Belkacem a répondu ceci :
« Monsieur Duvernois, le CSP est une instance indépendante dont nous avons la liberté de ne pas forcément adopter les projets. »
Objectivement, la question qui portait sur le nombre et la conformité des EPI n’a pas obtenu de réponse. La réponse était un détournement : d’un revers de la main la ministre a balayé la question, alors même que son audition devant les sénateurs visait à exposer son projet de réforme du collège et satisfaire la compréhension des élus et de ceux qu’ils représentent.
Si le volontarisme de l’équipe ministérielle est louable, son refus du dialogue porte préjudice à tout projet de réforme. Ce qui pourrait être une qualité appréciée des personnels enseignants, qui s’engagent pour la réussite des élèves, et des parents d’élèves devient aujourd’hui la source d’un conflit qui, a contrario, risque bien d’empêcher toute réforme et de dissuader tout politique d’en proposer pour plusieurs années !
Je suis partisan d’une réforme, mais contre cette réforme. La société évolue, les jeunes évoluent ; il est donc logique que les enseignements et les pratiques pédagogiques évoluent eux aussi. Ce n’est donc pas l’immobilisme que je prône : c’est une réforme concertée, et donc cohérente.
Aussi, dans une démarche constructive, depuis 3 semaines, j’ai essayé de mettre en valeur, de façon synthétique et avec simplicité, une première série d’ incohérences de cette réforme du collège. Chaque document met en lumière une incohérence de cette réforme du collège; une incohérence à laquelle Mme Vallaud-Belkacem et son équipe n’ont pas apporté de réponse. Après les avoir diffusées quotidiennement, les voici ici rassemblées.
N’hésitez pas enfin à me faire des retours à ce sujet (rubrique “commentaires”), si mes documents sont inexacts, faux, mauvais, maladroits…
Réforme – Incohérence n°1 Réforme – Incohérence n°2 Réforme – Incohérence n°3 Réforme – Incohérence n°4 Réforme – Incohérence n°5 Réforme – Incohérence n°6 Réforme – Incohérence n°7 Réforme – Incohérence n°8
Incohérence n°3: techniquement, les enseignements complémentaires comprennent les EPI et l’accompagnement personnellement. C’est donc distinct de l’enseignement de complément LCA (aussi bizarre que cela puisse paraître) qui n’est donc pas concerné par la phrase en question.
Incohérence n°7: l’un n’empêche pas l’autre, les LCA peuvent contribuer aux autres thématiques (même sans EPI LCA). Loin de moi l’idée de cautionner la réforme, cela dit!
Bonsoir Benoît, vous avez raison en effet sur les deux points et je vous remercie pour votre commentaire qui permet à mes documents de gagner en précision.
1- Incohérence n°3: l’enseignement de complément ne fait pas partie, en effet, des enseignements complémentaires. La question exacte à poser est donc la suivante: Pourquoi un EPI “Langues & Cultures de l’Antiquité” existe-t-il donc encore dans la réforme du collège ?
2- Incohérence n°7: il est juste de relever que l’arrêté du 19 mai n’interdit aucunement aux LCA de contribuer aux autres thématiques. L’inconvénient de “mettre dans des cases”, c’est que quand on vous met dans UNE case, “on” (vous, vos collègues, votre chef d’établissement, vos élèves et leurs parents) pense (et, vous avez raison, à tort) qu’on ne peut pas vous mettre ailleurs. Qui pensera à cette possibilité et la mettra en œuvre ? Beaucoup, j’espère, maintenant. Mais quel enseignant de Lettres classiques aussi pourra se permettre le luxe de se faire offrir des heures (disciplinaires ou de marge horaire) pour intervenir dans un EPI “LCA” ET dans un autre EPI ? La réponse, là, est beaucoup plus hasardeuse, il me semble.
Merci pour vos précisions.
Pour répondre à la fois à vos deux questions, voici ce qui devrait se passer dans mon établissement:
– les EPI ne seront pas librement choisis par les élèves. Les élèves suivront les EPI organisés par les professeurs qui leur auront échu, et ces derniers feront donc leur part d’EPI sur leurs propres horaires. Rien ne m’interdirait de faire donc un EPI LCA avec une classe de 5e sur mes heures de français.
– dans la pratique, il n’y aura sans doute pas d’EPI LCA (il faudrait que je sois très convaincant au CP et au CA, et comment justifier un EPI LCA sur mes heures de français ?). En revanche, il devrait bien y avoir l’enseignement de complément. L’arrêté ne spécifie pas, en effet, que l’enseignement de complément doive compléter un EPI LCA: il complète les EPI en général.
– S’il n’y a pas d’EPI LCA, je compte bien chercher à m’intégrer à d’autres EPI (notamment à contenus scientifiques, mais pourquoi pas avec des langues vivantes) en tant qu’enseignant de LCA. Mes collègues y sont d’ailleurs ouverts.
Bravo pour cette analyse et cette présentation brillantes ! Je vous ai relayé sur ma page de combat sur FB COMPRENDRE LA REFORME DU COLLEGE.