On a testé pour vous : L’exposition dont vous êtes le héros – Le Monde de Clovis au Musée historique Saint-Remi de Reims

On a testé pour vous : L’exposition dont vous êtes le héros – Le Monde de Clovis au Musée historique Saint-Remi de Reims

 

Cette fois, nous vous emmenons à la découverte du monde de Clovis grâce à une exposition de grande qualité et innovante dans sa conception, présentée au Musée historique Saint-Remi de Reims (c’est bien Remi et non Rémi !). Je remercie vivement l’association Sorbonne antique et les professeurs de Sorbonne Université, Monsieur Bruno Dumézil, professeur des universités, médiéviste, et Madame Sumi Shimihara, maîtresse de conférence en histoire médiévale, qui m’ont permis de partager leur journée d’excursion pour visiter les lieux les plus emblématiques de la Reims gallo-romaine et médiévale.

L’exposition se situe à une période de transition entre l’Antiquité tardive et le Haut Moyen-Âge qui est très bien restituée. La société mérovingienne se met alors en place à partir d’une matrice gallo-romaine et d’apports francs numériquement limités, mais dominants et alliés à l’Église par la conversion de Clovis.

La Porte de Mars à Reims, reconstituée au XIXème siècle  (photo personnelle)

Durocortorum (devenue Reims), à l’origine chef-lieu de la civitas des Rèmes, fut érigée en capitale de la province de Gallia Belgica, puis de la Belgica Secunda lors de la partition des provinces opérée par l’empereur Dioclétien. D’une superficie de 600 hectares, Durocortorum était la cité de loin la plus étendue de la Gaule belgique. La taille de la Porte de Mars, sur le cardo maximus, au nord-ouest de la ville, en porte témoignage : avec 32 mètres de long sur 20 de haut et 6 de large, il s’agit du plus grand arc commémoratif de tout l’Empire romain.

Le Monde de Clovis – L’exposition dont vous êtes le héros a été construite à partir de l’exposition Le Monde de Clovis – Itinéraires mérovingiens qui s’est tenue en 2021 au Musée royal de Mariemont dans le Hainaut belge. Le Musée national d’archéologie l’a ensuite scénarisée comme jeu de rôle pour la présenter en 2022-2023 à Saint-Germain-en-Laye. C’est sous cette forme plus interactive qu’elle est visitable à Reims jusqu’au 31 mars 2025. Les illustrations de cette exposition-parcours sont très réussies.

L’empire mérovingien  (photo personnelle)

Au début du parcours, qui est censé se dérouler à Paris, le visiteur choisit d’incarner l’un des quatre personnages de l’exposition :

Les quatre personnages de l’exposition  (photo personnelle)

Andarchius, né dans la petite paysannerie gallo-romaine, comme la plupart des habitants du royaume des Francs. Il compense son origine modeste en étant énergique et d’une grande audace Médard, issu de l’aristocratie franque. Il est prêt à quitter la propriété de ses parents pour partir en expédition. Intelligent, lettré et fin stratège, il souhaite suivre les traces de son père et devenir à son tour un guerrier de renom
Bathilde, issue d’une famille d’esclaves d’origine anglo-saxonne. Intelligente et ambitieuse, elle compte se lancer dans la mode et que les femmes les plus importantes du monde franc portent ses créations Geneviève, qui appartient à la petite communauté dite « syrienne » de Paris, ceux venus d’Orient. Sa famille s’est spécialisée dans le commerce de produits exotiques. Courageuse et diplomate, Geneviève cherche à réussir dans le monde franc

Sans divulgâcher le détail des péripéties de nos héroïnes et héros, voici les grandes étapes du parcours de vie d’un personnage mérovingien. Chacun et chacune d’entre eux vient au monde, fait ses premiers pas dans la vie, construit son avenir, arrive en âge d’aimer et de s’unir, puis agrandit sa famille. Le personnage est ensuite confronté à plusieurs défis à l’âge adulte et il choisit un destin vers la fin de sa vie.

À chaque étape, le personnage prend une décision qui détermine son sort, ses points de prestige et ses points de richesse. Le hasard a sa place, au moment de connaître le nombre de ses enfants, mais les aléas sont réduits, ce qui est plus motivant : les choix judicieux améliorent la situation et les perspectives du personnage.

Les objets et explications de l’exposition, parfois même un test, vous aident dans votre choix. Les différents aspects de la vie à l’époque mérovingienne : l’artisanat et le commerce, les relations avec les royaumes voisins, la vie quotidienne, les arts, les rôles de la Cour et des abbayes…

Geneviève la « syrienne », sur son navire marchand  (photo personnelle)

J’ai préféré tenir le rôle de Geneviève, dont la langue maternelle est le grec. Par exemple, le premier dilemme de Geneviève sera de développer des savoirs utiles à sa vie : elle pourra soit apprendre le latin, soit apprendre à compter, soit d’initier à la langue germanique pour lire des runes, soit apprendre « sur le tas » en en regardant faire son père.

Évocation de sépultures mérovingiennes à la fin du parcours de l’exposition  (photo personnelle)

La réussite d’un personnage s’apprécie in fine, en fonction de ses deux scores de prestige et de richesse, par le type de sépulture auquel il aura droit. Moins de 75 points dans chacun des deux ? C’est une simple tombe en pleine terre, à l’extérieur de l’église, qui l’attend. Plus de 150 points de prestige et plus de 100 points de richesse : il reposera dans un beau sarcophage de pierre, tout près de l’autel de la Basilique des Saint-Apôtres de Paris (imaginée pour l’occasion !). Il existe toute une gamme de situations intermédiaires, avec ou sans sarcophage de pierre, avec ou sans stèle. Cela vaut la peine de se démener !

Chaque joueur dispose d’un livret papier fourni correspondant au personnage choisi et peut également recourir à une application numérique ad hoc. L’ergonomie des parcours est remarquable et permet d’assimiler le contenu de l’exposition presque sans s’en rendre compte. Et on peut recommencer le parcours avec un autre personnage ou garder le même.

Le cloître de l’ancienne abbaye Saint-Remi  (photo personnelle)

Ce parcours interactif à travers Le Monde de Clovis peut être aussi l’opportunité de visiter le riche musée Saint-Remi, situé dans les bâtiments de l’ancienne abbaye royale Saint-Remi, dont son cloître majestueux.

Le tombeau de Flavius Jovin au Musée historique Saint-Remi  (photo personnelle)

Parmi les joyaux exposés au Musée historique de Saint-Remi, je citerai le tombeau de Flavius Jovin (310-370). Originaire de Reims, Flavius Valerius Jovinus fut maître de cavalerie et général en chef de l’armée romaine en Gaule et vainquit les Alamans. Il refusa sagement la pourpre impériale et poursuivit sa carrière, jusqu’à exercer la magistrature de consul, et se convertit au christianisme. Son tombeau, qui représente une chasse au lion, est le plus beau sarcophage antique en marbre conservé en France.

Le tombeau de Saint-Remi dans l’église abbatiale Saint-Remi  (photo personnelle)

L’abbaye Saint-Remi est un haut lieu de mémoire national : Remi, évêque de Reims y officia pendant 74 ans, y baptisa Clovis et y fut enterré dans un tombeau monumental. Remi, qui a vécu 96 ans (437-533), est à lui seul un trait d’union entre l’Antiquité tardive et l’époque mérovingienne. A partir de Louis XIII, les rois prirent l’habitude de se rendre de la Cathédrale Notre-Dame, érigée entretemps et devenue le lieu du sacre, jusqu’à l’abbaye Saint-Remi en grand cortège militaire.

Si vous l’entreprenez, votre visite au musée et à l’église abbatiale Saint-Remi, à un kilomètre au sud-est de la Cathédrale Notre-Dame de Reims (à l’autre extrémité du cardo maximus par rapport à la Porte de Mars !), sera ainsi amplement récompensée. Non seulement par une exposition attrayante, particulièrement agréable à vivre, mais aussi par la découverte des collections du musée Saint-Rémi et de l’église abbatiale éponyme… voire, plus largement, des autres merveilles de Reims inscrites au patrimoine mondial de l’Humanité.

 

Pour aller plus loin :

 

A propos Laurent Caillot

Amateur autodidacte des langues et cultures de l'Antiquité, parallèlement à mon métier d'inspecteur général des affaires sociales

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