On a testé pour vous : le nouveau manuel de latin GRADATIM

Dorian Flores, chargé de communication  pour La Vie des classiques, et les auteurs Lucas Ego et Mickaël Samoy, ont convié les professeurs à une visioconférence, que vous pouvez revoir ici, pour nous présenter le nouveau manuel GRADATIM, qui donc, comme son nom l’indique, a pour vocation d’apprendre le latin « pas à pas » et qui s’adresse aux grands débutants.

J’essaierai donc de vous décrire en quoi consiste la progressivité de ce manuel, et de répondre aux questions que les professeurs de latin du secondaire (collège comme lycée _ à noter que des étudiants l’ont testé pour apprendre ou réapprendre le latin) peuvent se poser quand ils appréhendent un nouvel ouvrage, et plus particulièrement comme il l’est présenté ici : une méthode qui fusionne les méthodes dites « actives » et les méthodes grammaticales plus traditionnelles.

 

 

I. Orberg, Familia Romana, la référence…

On pense forcément au Familia Romana pour les textes construits et non authentiques _ même si les auteurs précisent à la fin de chaque texte, l’extrait authentique de référence. Le professeur est invité s’il le souhaite à s’y reporter, et peut construire une séquence autour du manuel. Mais ne pas oublier que c’est avant tout une méthode, et donc, comme ce que propose Orberg, ne fonctionne que si elle est traitée de A à Z. En effet, comme pour son modèle, le vocabulaire est progressif, il s’accumule et s’apprend au fur et à mesure des lectures.

Nous suivons un maître d’école, le magister Lucius, et ses quatre élèves, deux garçons, Titus et Publius, et deux filles, Claudia et Aemilia.

Cela va donner des scènes de classe, qui sont aussi un prétexte à introduire le contenu des cours vus, c’est-à-dire le mythe de Saturne et la naissance des dieux, le mythe de Thésée et le Minotaure, la Guerre de Troie, le périple d’Enée, les débuts de la Royauté avec Romulus.

Ce manuel est conçu pour les élèves avec le professeur mais aussi pour les autodidactes. Les leçons et exercices systématiques servent à fixer les points de langues liés au texte de la leçon. Les exercices utilisent le vocabulaire vu dans les textes précédents.

 

II. … la spécificité du Gradatim.

Contrairement à l’ouvrage d’Orberg, le manuel n’est pas tout en latin. Les consignes des exercices sont en français, de même que les leçons, qui sont construites sur une double page. La leçon s’appuie aussi sur le vocabulaire vu dans les textes. 

On note aussi un résumé en tête de chaque chapitre des points de civilisation qui introduisent les personnages et le contexte, et une annonce des points de langue à repérer. A la fin du manuel, les élèves disposent des traductions : les élèves ne sont pas tentés par une traduction qui suit directement le texte, ils peuvent  faire des allers-retours entre le texte et sa traduction à la maison et retravailler en autonomie.

 

C’est revendiqué : le vocabulaire doit faire l’objet d’un apprentissage régulier, sinon passez votre chemin, cette méthode n’est pas pour vous !

Le vocabulaire nouveau est donné à côté du texte, donc contrairement au Familia Romana qui fonctionne par synonymie ou par périphrases et autres illustrations pour faire comprendre le vocabulaire. Chaque leçon compte environ 30 mots nouveaux. D’ailleurs, je vous reparle plus bas, des annexes et notamment des listes de vocabulaire format Excel, pour aider les professeurs à travailler ce point de manière ciblée, sont à venir.

 

On aime : la quantité et surtout la variété des exercices. Conjuguer, employer le verbe aux bonnes formes, traduire, compléter par la bonne terminaison, corriger les erreurs, compléter à l’aide du vocabulaire qui convient, répondre en latin aux questions, traduire en latin, résumer, inventer…

 

 

On aime : les illustrations de Jean-Claude Golvin, un aquarelliste réputé pour ses reproductions (ici on aperçoit un forum de la fin de l’Empire, la basilique Aemilia…) qui sont appareillées pour mettre en exergue le point de la langue. Les terminaisons à repérer sont en rouge, les phrases commentent ou racontent la scène dessinée. Une manière supplémentaire de repérer et de fixer le point de langue.

 

 

 

Les prépositions et le neutre sont vus tardivement, après que les élèves ont fixé le système des cas qui n’est pas naturel pour un locuteur français ne parlant pas de langue à déclinaison.

 

 

III. Zoom sur la progressivité

 Deux manières de procéder d’après les concepteurs : en autonomie, en autodidacte, il est suggéré de commencer par s’imprégner de la leçon et du vocabulaire avant de lire le texte ; en classe, accompagné du professeur, c’est d’abord le texte qui est lu, certains sont mêmes conçus de telle sorte qu’ils peuvent être déclamés ou joués.

Pas à pas, cas par cas…

Pour illustrer ce principe qui consiste non pas à étudier les déclinaisons les unes après les autres, mais à comprendre l’emploi des cas en contexte.

Les tableaux complets des déclinaisons et des conjugaisons sont proposés en annexe mais pas donnés en amont.

 

On aime : la construction de la notion de cas de manière progressive et intuitive, en contexte: par exemple sont traités dans un texte le nominatif avec le verbe être qui l’appelle naturellement ; accusatif et le présent de l’indicatif ; le vocatif et l’impératif qui vont de pair.

 

Des choix pédagogiques.

 Observons la table des matières :

Absence de 3ème déclinaison. Le vocabulaire de l’ensemble se veut fréquentiel et respecte les mots les plus employés, à quelques exceptions pour répondre à cette contrainte de construire des textes autour des deux premières déclinaisons uniquement.

Comme je le disais les prépositions sont vues tardivement. C’est une grosse différence avec Orberg qui les introduit d’emblée. A nouveau, une volonté annoncée de progressivité car les prépositions demandent d’appréhender les cas de l’accusatif et de l’ablatif dans un autre contexte et pas du tout naturel. Le genre neutre aurait pu entrer plus tôt mais les auteurs ont choisi de traiter la généralité, à savoir le féminin pour la 1ère déclinaison, le masculin pour la 2ème en priorité, et de voir les cas plus particuliers dans un second temps.

La gestion du temps est un critère à aborder pour planifier ses cours : les auteurs nous assurent que le manuel est assimilable en une année de 5ème qui compte 2h de latin par semaine (en comptant sur le fait que certains textes peuvent être optionnels). Intégrer le premier trimestre de quatrième pour plus de marges de manœuvre… Les auteurs ont conscience que l’apprentissage se fait souvent dans un temps restreint : les textes sont ainsi volontairement bien plus courts (autour de 200 mots) que dans le Familia Romana _ même si les longueurs d’Orberg étaient le moyen de comprendre le texte et d’intégrer les structures de phrases et les faits de langue grâce à la répétition. Ces dernières étaient aussi sources de lassitude pour certains : ici les auteurs ont voulu « donner un souffle », créer des supports variés et vivants en jouant sur différents types de textes : pourquoi pas continuer le latin oral en classe grâce aux structures apprises : Ubi sum ? Estne… ? Minime ! Libenter ! Heu !

Voici en l’occurrence un extrait qui peut être joué :

La question des voyelles accentuées a été posée : il faut savoir que les listes de vocabulaire contiennent la longueur des voyelles mais pas les textes.

L’étymologie en tant que telle n’est pas étudiée : les auteurs ne doutent pas des ressources des professeurs de latin eux-mêmes pour faire ces résonances.

 

Le professeur décidera si cette méthode peut intégrer les programmes officiels.

Pour rappel, les textes construits sont bien accueillis.

Dans tous les cas, le but annoncé des auteurs est d’en arriver aux textes authentiques : les textes sources sont cités, peuvent être mis en regard. Par exemple, un texte au discours indirect du Tite-Live sera ici repris au discours indirect, sûrement  simplifié, mais on ne trahit pas complètement les auteurs antiques.

Voici un extrait de la fin du manuel qui donne un aperçu de la difficulté de la langue à la fin du Gradatim :

 

La culture antique est présente et peut faire écho à quelques entrées des programmes.

« De la légende à l’histoire » accueille les chapitres sur les origines de Rome et ses figures héroïques, d’Enée à Romulus ; la fondation d’une cité avec l’exemple de Rome mais aussi de Carthage.

L’entrée « Vie privée et vie publique » intègre l’éducation et formation dans l’Antiquité : la relation entre le magister et ses discipuli est une entrée en matière qu’il est possible de poursuivre.

De nombreux mythes sont racontés dans l’ouvrage : peut-être qu’en interprétant l’entrée sur « Le monde méditerranéen » et la transmission de culture grecque à Rome…

 

 

 IV. Annexes et paratexte

On nous a annoncé des documents d’accompagnement sur le site La Vie des classiques en s’abonnant ici.

On y trouvera dans un premier temps la correction des exercices qui fera office de manuel du professeur.

 

On aime : les auteurs ont pensé à la liberté pédagogique, en effet beaucoup de professeurs aiment créer des contenus, ont à cœur de montrer les textes authentiques, même si je me répète, une méthode est pensée pour être suivie de A à Z, puisque l’objectif est avant tout d’apprendre la langue latine.

 

J’en ai parlé plus haut : des listes de vocabulaire, avec la suggestion des auteurs de travailler de manière systématique l’apprentissage du vocabulaire pour le retenir, le système des flashcards a été abordé mais aussi des solutions numériques où il suffit de rentrer le vocabulaire vu, et les applications se chargent de créer des exercices de révision et des jeux.

L’échange avec les invités a mis en évidence des demandes de fichiers audio. Sont envisagés : des vidéos, de nouvelles illustrations, les textes authentiques qui correspondent aux textes construits d’après ces auteurs.

Une suite est en travail…

 

Gradatim en chiffres :

Un chapitre contient 4 ou 5 leçons.

La méthode contient 5 chapitres.

700 mots dont une centaine de noms propres sont balayés.

24 par 17, c’est son format.

Sortie prévue le 18 août, au prix de 15€ (format epub prévu).

 

Les extraits du manuel Gradatim qui sont proposés dans cet article le sont grâce à la contribution de Dorian Flores, chargé de communication pour La Vie des Classiques.

Pour toute question, vous trouverez un interlocuteur en envoyant un courriel à : lespetitslatins@gmail.com

Julie Wojciechowski

A propos ju wo

Professeur de français et des options FCA et LCA dans l'académie de Lille. Passionnée de cultures antiques et de langues anciennes et attachée à leur rayonnement et à leur promotion dès l'école primaire. Co-responsable du concours ABECEDARIVM pour l’association ATC.

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