NUMISmythique #épisode 18 : une histoire d’imitation

Maxime Cambreling est un professeur de lettres classiques passé par l’école du Louvre, le musée du Louvre et le Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF) avant d’enseigner au collège Camus de Bayonne. Il est en outre mon référent numismatique !

Après les premiers épisodes de cet été 2024, je vous propose de continuer à mettre en lumière cet automne les publications qu’il a partagées avec nous sur les réseaux dans cette chronique baptisée NUMISmythique. De quoi s’agit-il ? De numismatique, l’étude des pièces de monnaies, et des mythes, ces histoires passionnantes qui fondent la culture antique.

Je vous souhaite de belles découvertes lors de ce rendez-vous du dimanche !

Julie Wojciechowski

 

Aujourd’hui, nous partons à la découverte des pièces frappées pour imiter les monnaies officielles.

 

Les imitations locales / imitations radiées / minimi / imitations barbares

 

Ces termes désignent un même ensemble d’objets. Les fouilles ont depuis longtemps mis au jour de ces minuscules monnaies au style maladroit et naïf très éloigné du style officiel. Les “antiquaires” (ainsi appelait-on les érudits locaux avant la professionnalisation de l’archéologie) y ont d’abord vu de pâles copies des monnaies officielles par des peuples barbares (en période d’invasion ?) à l’état de civilisation encore enfantine et pétrie d’admiration pour le perfectionnement romain. On les a aussi appelés “minimi” (plur de minimus) en raison de leur taille très inférieure aux standards.

 

Depuis, la connaissance a évolué (mais peu, car rares sont les chercheurs ou même les collectionneurs à se pencher sur ces monnaies si peu canoniques…) et on voit désormais dans ces monnaies des objets frappés localement, pour pallier le manque de numéraire. Le pouvoir central n’émet plus assez, et les masses émises n’irriguent plus assez loin l’ensemble du monde romain. Mais ces régions ont besoin de monnaies pour leurs échanges quotidiens. Des responsables prennent les choses en main et font réaliser ces objets que des numismates plus tardifs appelleraient “monnaies de nécessité”. Elles seraient émises vers les IVè et Vè siècles (parfois avant pour certaines d’entre elles, mais elles semblent souvent vraiment tardives).

 

Ils copient, c’est sûr, les monnaies qui circulaient au moment de leur fabrication. On reconnaît aux avers des portraits qui évoquent Claude II, Tetricus I et II, des constantiniens pour l’essentiel. Et les revers plus ou moins correspondants. Mais il semble évident que la plupart des graveurs de ces monnaies ne savaient pas lire et les légendes sont très souvent “dégénérées”. Il me semble vain de vouloir reconnaître une monnaie officielle derrière chaque imitation. Si certaines sont assez proches (voir ici l’hybride avers rétrograde de Roma / revers de Constantinopolis, ou l’AE3 copiant Valentinien II mais à la légende en charabia), d’autres sont de très libres interprétations.

 

Le pouvoir central semble avoir toléré ces frappes qui lui rendaient service. Ce n’était pas de fausses monnaies destinées à tromper mais à permettre les échanges quotidiens.

 

Quoi qu’il en soit, je trouve ces petites monnaies pleines de charme. Leur style naïf est très rafraichissant et amusant, et leur étude réserve sans doute encore beaucoup d’enseignements. En plus, les collectionner ne coûte bien souvent pas cher. On trouve pour 3 fois rien de ces petites monnaies très attachantes.

 

(ici, un échantillon de mes imitations, la plus petite faisant 0.59g, 9.38mm)

 

 

Maxime Cambreling

 

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Article mis en page par Laurent Caillot

A propos ju wo

Professeur de français et des options FCA et LCA dans l'académie de Lille. Passionnée de cultures antiques et de langues anciennes et attachée à leur rayonnement et à leur promotion dès l'école primaire. Co-responsable du concours ABECEDARIVM pour l’association ATC.

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