Arrête ton char Langues & Cultures de l'Antiquité
Arrête Ton Char ! a décidé de donner la parole à des personnalités du monde de la culture, des médias, de l’entreprise et de la politique qui souhaitent témoigner de l’importance des Langues et Cultures de l’Antiquité au XXIème siècle.
La culture classique, un avantage dans le monde de la musique électronique ?
Pourquoi la culture classique a rythmé toute notre carrière.
Par Thomas Bangalter, membre du groupe electro DAFT PUNK
Peu de gens le savent (la discrétion c’est notre truc !), mais Guy-Manuel (de Homem-Christo) et moi nous nous sommes rencontrés sur les bancs du lycée Carnot à Paris, dans un cours de latin, vers 1986-87. A cette époque là, on pensait tous les deux à faire des études de lettres classiques, voire à passer le CAPES. On avait pris l’habitude de réviser ensemble, et de créer des petites “chansonnettes” pour retenir certaines leçons de grammaire. Je me souviens notamment d’un cours fameux sur Néron, avec une blague du prof autour de l’expression “quo vadis ?”… On en avait tellement ri que bien plus tard, on a décidé d’appeler un de nos titres “veridis quo” :
Finalement, on s’est dirigé vers la musique, mais la rigueur que nous ont apportée nos cours de latin a été un vrai plus. Décliner, c’est comme de la techno, c’est à la fois répétitif, mais toujours varié. Et puis il y a de l’imagination, des histoires incroyables… Discovery, notre deuxième album, a certes un titre en anglais, mais c’est un hommage aux voyages d’Ulysse ! On peut aussi y voir un jeu de mots avec “Very Disco” : “J’apprends beaucoup”. Je pense aussi que les cours sur la scansion sont pour beaucoup dans notre succès… iambe, anapeste, dactyle, spondée… tous ces rythmes endiablés qu’on a réinterprétés à notre façon ! Vous avez déjà vu le clip d’around the world ? c’est comme un passage de Lucrèce mis en musique : sur un un rythme de base, des images, de la poésie, des tmèses….
Forcément, dans le monde de l’electro, ça nous a rendu un peu “différents”… Être capable de réciter du Tibulle à 4h du matin pendant qu’on mixe, ça en a fait rire plus d’un, ça en a aussi épaté d’autres. En 2005, on a décidé d’appeler notre troisième album “Roman after all”, c’était une manière de dire à tout le monde que le latin, c’est formidable, c’est riche. Les mecs du groupe Phoenix, des supers potes, sont parmi ceux qui comprennent le mieux ce plaisir. Eux aussi, c’est des passionnés de l’antiquité ; il n’y a qu’à voir le nom du groupe ! On a jamais eu honte en tout cas. Notre seul regret ? ne pas avoir pu apprendre le grec ancien ; mais il n’est peut-être pas trop tard…
Thomas Bangalter, musicien, Daft Punk
(évidemment, c’était un “piscis aprilis”)
