LES TEMPLES GRECS
Avant et après leur grande époque
Jean-Claude Daumas pour Latine Loquere
Sources :
Jean-Jacques MAFFRE – L´art grec, Que sais-je ? n° 2278, PUF, 2001, 128 p.
Roland MARTIN – L´art grec, Encyclopédies d´aujourd´hui, Le Livre de Poche, 1994, 731 p.
INTRODUCTION
Du VI° au IV° siècles avant J.-C., les Grecs ont élevé un très grand nombre de temples tant en Grèce proprement dite qu´en Ionie (littoral de l´Asie Mineure) et en Grande Grèce (Italie du sud et Sicile). Cet ensemble, où les chefs d´œuvres ne manquent pas, est un exemple de ces grands legs que l´Antiquité a fait à la civilisation occidentale.
Comment cette architecture a-t-elle été créée ? Qu´est-elle devenue après son apogée de 3 siècles ? Deux questions qui ne manquent pas d´intérêt.
I. ORIGINE A L´EPOQUE ARCHAàQUE (VIII° – VII° siècles)
– Les premiers temples grecs (IX°-VIII° siècles) imitaient les maisons d´habitation de l´époque, formée d´une pièce allongée souvent précédée d´un porche à 2 colonnes placées en façade entre la terminaison (ante) des 2 murs latéraux (plan in antis) : c´est un écho du megaron mycénien.
– Megaron = pièce principale du palais mycénien [à Pylos ou Tirynthe] avec son foyer central entouré de 4 colonnes (en bois), précédé par 2 vestibules s´ouvrant par 2 colonnes sur la cour centrale.
[Est-ce une survivance directe ? La question fait débat].
– Agrandissement du temple primitif par l´introduction d´une colonnade (piliers en bois reposant sur une dalle en pierre) dans l´axe de la pièce. Elle soutient en leur milieu les poutres de la charpente du toit dont les extrémités reposent sur des murs en brique crue, puis sur un péristyle (colonnade entourant partiellement ou totalement l´édifice). Dans ce cas, le toit à double pente “ plus large “ protège des intempéries la brique crue du bâtiment interne : c´est le fameux plan dit « périptère » des futurs grands temples grecs.
– 650-580 : deux mutations décisives pour l´architecture des temples.
– La pierre taillée remplace peu à peu le bois, l´argile et
les moellons bruts du soubassement [Les Grecs lors de la colonisation de l´Ionie entrent en contact avec les outils et les techniques de taille de la pierre des civilisations orientales] : bois et pierre mélangés, puis pierre seule.
– Formation des 2 ordres (dorique et ionique) et adoption d´un plan rationnel : la suppression de la colonnade centrale permet d´installer la statue de la divinité sur l´axe central d´une grande salle rectangulaire (naos) précédée d´un vestibule (pronaos) et terminée par une salle arrière (opisthodome). La façade arrière est désormais le symétrique de la façade avant : colonnade et fronton.
– Vers 600, le temple d´Héra à Olympie et celui d´Artémis à Corfou sont déjà des temples classiques et à partir de 580/570 débutent les grands chantiers doriques et ioniques qui vont couvrir le monde grec de majestueux édifices …
II. A L´EPOQUE HELLENISTIQUE (III°-I° siècles avant J.-C.)
Si les temples en Grèce et Grande Grèce sont très nombreux [inutile d´en construire de nouveaux], en Orient (Ionie) beaucoup ont été détruits par les Perses et leur reconstruction se fait dans une « ambiance » qui porte vers le grandiose, le monumental, sinon le colossal. A un art des cités grecques tout empreint de « mesure » succède un art d´apparat pour flatter les rois des dynasties créées à la suite des conquêtes d´Alexandre le Grand (335-323).
– Ampleur des 3 temples ioniques reconstruits à Didyme, Ephèse et Sardes : 109, 107 et 98 m de longeur.
– Multiplication des colonnes : 8 en façade (octostyle) et double péristyle (diptère).
– Luxuriance du décor (chapiteaux, entablement, fronton) avec le choix de l´ordre corinthien qui, par la suite, sera (avec l´ionique) si apprécié des Romains : le dorique “ qu´ils ont pourtant découvert en premier en Grande Grèce “ ne les a pas séduit.
Les Romains se sont emparés successivement de l´Italie du sud grecque (275), de la Sicile punique (241) et grecque (212 = Chute de Syracuse), de la Grèce (146) et de l´Ionie (129). Ils ont à leur tour édifié de nombreux temples, proches du modèle grec qui a ainsi perduré un demi millénaire de plus …