Jean-Claude Daumas pour Latine Loquere
LES 4 ÂGES DE LA GRECE ANTIQUE
L´histoire de la Grèce ancienne s´étend sur environ 2 000 ans ; 2 millénaires qui peuvent être aisément scindés en 4 phases cohérentes.
LA GRECE MYCENIENNE (1700-1100)
6 siècles de vie pour une civilisation originale de l´âge du Bronze..
1700-1500 : émergence d´une aristocratie guerrière grâce à un essor économique local et aux échanges avec le brillant monde minoen (Crète) : emprunt de l´écriture et de l´architecture palatiale.
Vers 1400 : apogée des Mycéniens qui désormais dominent la Crète (légende Thésée-Ariane-Minotaure) et, commercialement, le monde méditerranéen. La puissance mycénienne est basée sur des cités (Mycènes, Tirynthe, Pylos, …) élevées au sommet d´une colline, ceintes d´un rempart aux blocs cyclopéens protégeant le palais royal. La légendaire prise de Troie (Achille, Ulysse et son cheval) illustre cette force.
Vers 1200 : destruction des palais et déclin rapide.
Vers 1100 : disparition de la civilisation mycénienne (abandon de Mycènes, Tirynthe, …).
LA GRECE ARCHAàQUE (1100-500)
6 siècles là aussi, période marquée par une ascension qui aboutira à l´apogée de la civilisation grecque lors des Vème et IVème siècles.
XIème à IXème siècles : les « âges obscurs », très peu documentés, mais qui lègueront la métallurgie du fer et surtout un système d´écriture accessible au plus grand nombre : inspiré de l´alphabet phénicien, l´alphabet grec ne comprend que 24 lettres dont – invention capitale – 8 voyelles.
Vers 800 : rédaction de l´Iliade (Guerre de Troie en 15 000 vers) et de l´Odyssée (retour d´Ulysse à Ithaque en 12 000 vers) par « Homère » : les Grecs ont désormais leur épopée fondatrice à laquelle ils se réfèreront sans cesse.
VIIIème-VIIème siècles : fondation de colonies grecques tout autour de la Méditerranée, de l´Espagne (Ampurias – voyage latinistes diois 2010) à la Mer Noire, en particulier en Sicile (Agrigente, Syracuse “ voyage latinistes diois 2009) et Italie de Sud (Poseidonia “ voyage latinistes diois 2011). Il s´en suit un essor sans précédents du commerce méditerranéen, facilité par l´invention au VIème siècle en Lydie (Crésus) de la monnaie.
VIIIème-VIème siècles : évolution de la cité (polis) créée au VIIIème siècle avec le remplacement de la royauté par l´aristocratie. Les grandes familles se partagent le pouvoir mais ce système est battu en brèche dès le VIIème siècle par :
-La révolution hoplitique : la cavalerie (aristocrates) est supplantée par l´infanterie des hoplites : soldats-citoyens lourdement armés qui se couvrent mutuellement de leurs boucliers. Ce système donne pour plusieurs siècles une supériorité militaire aux Grecs.
-Les tyrans qui gouvernent avec l´appui du peuple : à Athènes, Pisistrate (560-527) assure le ravitaillement en blé, embellit la ville, …
-Les législateurs qui établissent des lois valables pour tous. A Athènes, vers 620 « sévérité draconienne » des lois de Dracon, et, entre 510 et 500, instauration des lois de Clisthène base d´un système démocratique inconnu jusque là : égalité politique entre tous les Athéniens citoyens.
LA GRECE CLASSIQUE (500-336)
A peine 2 siècles, mais quels siècles ! C´est la Grèce antique par excellence, l´époque la plus brillante de la civilisation grecque avec une densité rare de noms célèbres et de chefs-d´œuvre, et ce dans tous les domaines culturels.
Une concentration qui est maximale au Vème siècle et à Athènes, symbolisée par des noms comme Socrate, Phidias, Parthénon, Périclès : l´expression « Siècle de Périclès » est encore plus justifiée que celle de « Siècles d´Auguste » ou « Siècle des Médicis », sans parler de « Siècle de Louis XIV ». Les 2/3 au moins des grands noms de la Grèce antique ont vécu et œuvré à l´âge classique : les philosophes Socrate, Platon, Aristote ; les dramaturges Eschyle, Sophocle, Euripide, Aristophane ; les sculpteurs Myron, Polyclète, Phidias, Scopas, Praxitèle ; l´architecte Hippodamos de Milet ; le médecin Hippocrate, l´historien Thucydide, le mathématicien Pythagore, l´orateur Démosthène, …
Dans les domaines politique et militaire, la densité des événements n´est pas moindre. Le Vème siècle débute par le plus haut fait d´armes des Grecs lors des Guerres Médiques. Les petites armées grecques ont vaincu les immenses armadas perses venues envahir leur pays : sur terre à Marathon (490) puis sur mer à Salamine (480) et sur terre à Platées (479). Après la Guerre de Troie, c´est cette fois une épopée bien réelle et qui remplit de fierté les Grecs, en premier les Athéniens décisifs à Marathon et encore plus à Salamine, ce qui conforte leur jeune démocratie.
Cette union momentanée des principales cités grecques ne sera qu´un feu de paille : les guerres fratricides ne tarderont pas.
479-431 : hégémonie [hêgemonia = suprématie] d´Athènes qui contrôle toutes les îles de la mer Egée en dirigeant à son profit la Ligue de Délos (alliance Athènes-îles contre les Perses).
431-404 : la terrible Guerre du Péloponnèse entre Athènes et Sparte (et leurs alliés respectifs) qui se termine par la défaite d´Athènes.
403-371 : hégémonie de Sparte et redressement athénien.
371-361 : hégémonie de Thèbes.
360-336 : établissement de l´hégémonie macédonienne. Philippe II, roi de Macédoine (territoire au nord de la Grèce), profite des querelles entre cités grecques : vainqueur à Chéronée (336), il contrôle la Grèce.
LA PERIODE HELLENISTIQUE ET ROMAINE (336 avant J.-C.à 390-400 après J.-C.)
Si les cités grecques sont désormais sous domination macédonienne puis, à partir de 146 avant J.-C., romaine, jamais la civilisation grecque ou hellénisme (Hellên = Grec) n´aura été implantée sur un aussi vaste territoire, à la suite des conquêtes d´Alexandre le Grand, fils de Philippe II de Macédoine.
L´épopée d´Alexandre le Grand, lors d´un très court règne (336-323), conduit Grecs et Macédoniens jusqu´en Asie centrale et monde indien après la destruction de l´Empire perse : c´est finalement la 3ème épopée pour la Grèce antique.
Ce triomphe de la culture grecque se manifeste par :
– Le rayonnement d´Alexandrie (Egypte) qui supplante Athènes, attirant des savants de toutes les disciplines autour de sa célèbre bibliothèque : 500 000 œuvres concernant tous les savoirs de l´époque. Alexandrie brille avant tout dans le domaine scientifique : Euclide, Archimède, Eratosthène.
– Athènes, reste cependant une référence incontournable pour ses œuvres d´art et ses écoles philosophiques : création du stoïcisme et de l´épicurisme qui influenceront beaucoup Rome (Scipion, Cicéron, …).
– L´Ionie (littoral de l´Asie mineure sur la mer Egée) l´emporte pour l´urbanisme, l´architecture et la sculpture, en particulier à Pergame.
– Rome domine la Grèce mais l´hellénisme est un modèle assimilé et respecté par les Romains qui, par exemple, financent la restauration de monuments. Mieux même, l´empereur Hadrien (117-138) est un véritable philhellène (= ami des grecs) et l´empereur Marc-Aurèle (161-180) rédige en grec ses Pensées.
– Le christianisme à ses débuts « parle » grec : Bible des Septante (Ancien Testament traduit en grec) ; Nouveau Testament rédigé en grec par les 4 Evangélistes (Matthieu, Marc, Luc et Jean) ; vocabulaire à racines grecques : Eglise (ekklésia = assemblée), eucharistie, hérésie, schisme, martyr ; …
Les années 390-400 après J.-C. sont un repère commode pour marquer, sinon la fin de la civilisation grecque, du moins la disparition de plusieurs de ses éléments emblématiques : interdiction du polythéisme (le christianisme devient religion unique de l´Empire romain) et “ logiquement – des Jeux Olympiques ; pillage d´Athènes par les Goths d´Alaric.
Pour en savoir (beaucoup) plus que ce résumé très succinct :
François LEFEVRE – Histoire du monde grec antique, Livre de Poche, 2007, 632 p.
Nouvelle histoire de l´Antiquité, Points H (H 212 à 216), Le Seuil. En particulier :
– tome 2 “ Edmond LEVY “ Le Vème siècle, 1995, 316 p.
– tome 3 “ Pierre CARLIER “ Le IVème siècle, 1995, 353 p.