Le sanctuaire et l´oracle d´Apollon à DELPHES
Jean-Pierre Masson pour Latine Loquere
I. SITUATION GEOGRAPHIQUE :
Delphes se situe à proximité de la côte nord du golfe de Corinthe, à 17 km de la mer et du port d´Itea où accostaient les pèlerins. Au N-E s´élève le Mont Parnasse culminant à 2457m. Le sanctuaire épouse les escarpements des Roches Phédriades parmi les pins, les oliviers et les cyprès dans un cadre grandiose dominant le ravin et la vallée du Pleistos.
II. ORIGINES MYTHIQUES DU SANCTUAIRE DANS UN SITE EXCEPTIONNEL :
D´après la légende Delphes fut fondée par Zeus. Désireux de déterminer le centre de la terre sur laquelle il régnait, Zeus envoya deux aigles qui la survolèrent et se croisèrent à proximité du Mont Parnasse. Ils définirent ainsi le centre de l´univers à Delphes : omphalos, le nombril du monde.
Dès le deuxième millénaire av JC à l´époque mycénienne, Gaia ou Gê la mère des dieux fut la première à rendre des oracles sur le site. Sa fille Thémis lui succéda, suivie par sa sœur Phoebé qui surnomma Apollon Phoebus le jour de sa naissance sur l´île de Délos. Puis Apollon, fils de Léto et de Zeus les remplaça peu après. Selon un hymne homérique du VIIIè siècle av JC, Apollon éleva son premier temple à Delphes après avoir tué Python, le redoutable serpent gardien du sanctuaire de Gaia. Respectant la loi qu´il avait lui-même instaurée, Apollon s´exila pendant huit ans pour expier son crime. Puis il revint en maître absolu des lieux, devenant Apollon Pythien dont les oracles étaient interprétés par une femme sélectionnée pour sa vertu et sa chasteté, la Pythie.
Lors de son parcours de Délos dans les Iles Cyclades jusqu´à Delphes, Apollon prit la forme d´un dauphin qui traversa la mer. Son surnom de Delphis serait à l´origine du nom de Delphes.
Les secousses et grondements telluriques, comme l´aspect grandiose et inquiétant des Roches Phédriades fendues par une brèche où coulent les eaux de Castalie, la source sacrée, ont certainement contribué à forger la légende, puis consacrer le site de Delphes.
III. DELPHES, SANCTUAIRE RELIGIEUX & CONSERVATOIRE DE L´HISTOIRE GRECQUE
A) AU NIVEAU INFERIEUR
1°- LE SANCTUAIRE D´ATHENA PRONAIA
Face à la vallée du Pleistos avant d´arriver au sanctuaire principal se trouve le sanctuaire d´Athena Pronaia appelé aussi aire de Marmaria car son site servait de carrière de marbre.
Anciennement dédié au culte d´une déesse ( découverte d´idoles mycéniennes), le sanctuaire devint celui d´Athena, gardienne du sanctuaire d´Apollon et de son temple : Pronaia, devant le temple.
Vers 650 av JC fut érigé un temple archaïque en poros (tuf), reconstruit et agrandi vers 500 av JC de style dorique périptère, 6 colonnes en façade, 12 sur les côtés, un pronaos, une cella longue et étroite sans opisthodome. Suite à un tremblement de terre et la chute de rochers, on tenta de protéger le temple par un mur entre les colonnades.
Ce temple à son tour fut détruit au IVè siècle, mais on en conserva les ruines par piété.
Entre temps avaient été érigés deux petits trésors ( petits bâtiments en forme de temples construits par différentes cités pour abriter les objets précieux dédiés à la divinité Athena)
A l´ouest du temple du IVè siècle se dressait un trésor d´ordre dorique construit après les guerres contre les Mèdes (prédécesseurs des Perses) de 480 à 470 av JC ; à côté un édifice plus petit et plus ancien d´ordre ionique archaïque en marbre de Paros (530 av JC) était probablement le trésor de Massalia (Marseille).
Sur le flanc ouest du Trésor de Massalia, au début du IVè siècle fut élevée par l´architecte Theodoros la Tholos de Delphes (rotonde) d´ordre dorique, entièrement en marbre pentélique, entourée d´un péristyle de 20 colonnes cannelées, le mur de la cella couronné de triglyphes et de métopes illustrant le combat contre les Amazones, peut-être évoquant le culte de Gaia, la Terre-Mère.
En 370-360 av JC à l´extrémité ouest du sanctuaire on décida de bâtir un nouveau temple dédié à Athena Pronaia dorique et prostyle en calcaire gris du Parnasse. Il se distingue par sa sobriété et ses proportions : 11x22m. 6 colonnes soutenaient la façade devant un pronaos peu profond ; 2 colonnes ioniques entre le pronaos et la cella en composaient le seul ornement.
2°- LE GYMNASE
En quittant le sanctuaire d´Athena Pronaia pour se diriger vers le sanctuaire d´Apollon on trouve sur la gauche le gymnase datant du IVè siècle av JC à deux niveaux, réaménagé par les Romains. Sur la terrasse inférieure subsistent les restes d´une cour à péristyle-la palestre, et une piscine circulaire. Sur la terrasse supérieure on peut distinguer les vestiges d´un xyste (piste couverte)
3°- LA FONTAINE CASTALIE
Elle se situe à droite en remontant en direction du sanctuaire d´Apollon. Déjà aménagée à l´époque archaïque dans la brèche entre les Roches Phédriades, elle est intimement liée au culte d´Apollon : les pèlerins venaient s´y livrer aux rites de purification de même que la Pythie avant de pénétrer dans l´enceinte sacrée. L´aspect actuel de la fontaine remonte à l´époque hellénistique et romaine.
B) AU NIVEAU MEDIAN
1°- L´AGORA ROMAINE
Elle précède l´accès au sanctuaire d´Apollon proprement dit avec des vestiges de thermes et de maisons de brique. Sur le côté droit un portique ionique abritait des boutiques destinées aux pèlerins. Ici se niche aussi une église paléochrétienne.
2°- LE SANCTUAIRE D´APOLLON
Sur les escarpements de Rhodini, la Roche Phédriade occidentale, apparaît l´aire sacrée ou temenos d´Apollon accrochée à la pente. L´entrée principale se trouve à l´angle S-E comme pour les pèlerins de l´Antiquité.L´enceinte du temenos (péribole) percée de 9 portes remonte au VIè siècle av JC pour le côté ouest en appareil polygonal, et au IVè siècle pour le reste. Cette enceinte délimite un espace trapézoïdal de 200m x 130m dont le côté sud est irrégulier. La partie inférieure du trapèze est réservée aux ex-voto (statues, stèles gravées d´inscriptions, trésors) érigés par les cités grecques et qui se sont accumulés dans le temps.
La voie sacrée dont le dallage actuel est de l´époque romaine serpente au milieu d´un foisonnement d´ex-voto et de trésors pour atteindre le temple d´Apollon dans la partie médiane du temenos et le théâtre dans l´angle supérieur ouest. La voie était interdite aux chars.
A droite en entrant dans le temenos, la première base est celle du Taureau de Corcyre (Corfou actuel) en bronze consacré à Apollon vers 480 av JC. Plus loin, toujours à droite de la voie sacrée, se présentent les ex-voto des Arcadiens et des Lacédémoniens. Ces derniers sortirent victorieux de la guerre du Péloponnèse contre les Athéniens (431-404 av JC). Par défi ils installèrent leur ex-voto face à celui des Athéniens. Il se composait de 9 statues des dieux, dont Apollon et Poseidon couronnant leur général en chef Lysandre. 28 autres statues représentaient généraux et amiraux spartiates ayant assisté Lysandre : les Navarques.
Après avoir battu les Spartiates, les Arcadiens installèrent leur ex-voto provenant du butin prélevé sur les vaincus devant le monument des Navarques.
En face à gauche de la voie sacrée se dresse l´ex-voto des Athéniens commémorant leur victoire de Marathon sur les Perses en 490 av JC. Certaines des statues furent attribuées à Phidias.13 statues en bronze représentaient Athena et Apollon encadrant Miltiade, le héros victorieux et les 10 héros légendaires d´Athènes.
Deux hémicycles bordent ensuite la voie sacrée. Celui de droite était le monument des Rois d´Argos gravé de dédicaces (369 av JC). Celui de gauche dit des Epigones commémorait la bataille d´Oenoé remportée sur les Spartiates vers 460 av JC.
Plus loin à gauche, ne restent que les fondations du Trésor de Sicyône (VIè siècle) avec le réemploi d´éléments architecturaux plus anciens dont des métopes sculptées d´environ 560 av JC déterminantes dans l´histoire de la plastique grecque, puis apparaissent les ruines du Trésor de Siphnos construit vers 525 av JC par les habitants de cette île des Cyclades riches grâce à l´exploitation de leurs mines d´or. C´était l´un des plus beaux exemples de style ionique en marbre caractérisé par un fronton que soutiennent des caryatides et une frise ornée de reliefs exposés au musée.
Le Trésor de Thèbes se trouve ensuite à gauche avant le coude décrit par la voie sacrée. Les soubassements sont en tuf, mais il contraste avec le Trésor de Siphnos par la sobriété des matériaux en calcaire gris.
Dans le coude de la Voie sacrée ne subsistent que les soubassements du Trésor des Béotiens et l´omphalos de calcaire.
En poursuivant sur la gauche a été reconstruit intégralement le Trésor des Athéniens grâce aux éléments le composant laissés sur place. C´est un édifice d´ordre dorique en marbre blanc de Paros peut-être construit après la victoire de Marathon sur les Mèdes de Darius. Cependant pour certains archéologues, il s´agirait d´une offrande de la démocratie athénienne naissante vers 505-500 av JC. Les frontons et métopes sont décorés de reliefs assez bien conservés illustrant le combat des Grecs et des Amazones(au Musée). Des inscriptions sur le mur sud de la terrasse devant le Trésor sont dédiées à Apollon après la bataille de Marathon et on y trouve deux hymnes qui sont adressés à ce même dieu avec leur annotation musicale.
Après le Bouleutérion ou Sénat de Delphes, construit en poros (tuf) se dresse un énorme rocher qui s´était détaché des Phédriades bien avant l´aménagement du sanctuaire : le rocher de la Sibylle où se serait arrêtée la prophétesse légendaire d´Asie Mineure afin de prononcer ses oracles. Encore au-dessus sur un rocher se trouve la base de la colonne ionique des
Naxiens représentant un Sphinx juché sur une colonne de plus de 9 m de haut (560 av JC), ex-voto de l´île cycladique de Naxos à Apollon. (au Musée)
A proximité se trouvait la source du sanctuaire de Gaia ou Gê gardée par Python dont Apollon s´ était débarrassé afin de s´emparer de l´oracle.
Environ 50 m plus haut que le Trésor des Athéniens s´étend une place circulaire, l´Aire, de 16 m de diamètre servant à la représentation du meurtre de Python par Apollon pendant les fêtes pythiques célébrées tous les huit ans. (Septeia)
Tout près, à gauche de la Voie sacrée se dresse le Portique des Athéniens dont il reste 3 colonnes ioniques sur huit en marbre pentélique construit après 478 et qui abritait des trophées navals pris aux Perses de Xerxès (478 av JC).
Au dessus du portique s´étend sur 83 m de long le mur polygonal de soutènement du Temple d´Apollon (VIè siècle av JC). Plus de 800 actes d´affranchissement d´esclaves des époques hellénistique et romaine y sont gravés.
En bordure de l´Aire à droite de la Voie sacrée s´élevait le Trésor des Corinthiens dont peu de choses subsistent.
La voie s´élève pour atteindre le parvis du Temple d´Apollon. A droite, un peu en dessous, se dresse le socle circulaire du Trépied de Platées érigé pour commémorer la victoire éponyme sur les Perses en 479. Le trépied reposait sur une colonne de bronze constituée de torsades dessinées par 3 serpents enlacés.L´empereur Constantin la fit transporter dans sa capitale où elle demeure sur la place de l´Hippodrome de Constantinople.
La Voie sacrée rejoint alors le Carrefour des Trépieds, divers ex-voto dont les plus remarquables étaient ceux des tyrans de Syracuse Gélon et Hiéron (trépieds et victoires en or de 1855 kg environ) et la Colonne d´Acanthe des Thyiades aujourd´hui au Musée.
Le grand autel d´Apollon se présente à gauche du parvis dédicacé par les habitants de Chio au Vè siècle après leur libération du joug perse.
3°- LE TEMPLE D´APOLLON
A mi pente se dresse une vaste esplanade soutenue au sud par un mur polygonal appareillé en blocs calcaires à joints curvilignes d´où s´élevait le temple. Au nord également, un mur de soutènement, l´ ischegaon, devait le protéger des éboulis des Phédriades. Le temple visible est celui du IVè siècle av JC, le troisième en date, le premier du VIIè siècle ayant brûlé en 548 av JC, le deuxième construit pat souscription d´Hellènes et d´étrangers fut détruit en 373 av JC. Ce dernier temple fut achevé en 330 av JC grâce aux architectes Spintharos de Corinthe, Xénodros et Agathon.
Il s´agissait d´un temple dorique périptère avec 6 colonnes en façade et 15 sur les côtés exécuté en tuf recouvert de stuc de 60m,3 x 23m,8. Le fronton était décoré de sculptures d´Apollon arrivant à Delphes sur un char accompagné de sa mère Lito et sa sœur Artémis. Au fronton ouest figuraient le coucher du soleil, Dionysos et les Thyiades. Il ne reste probablement que la figure de Dionysos. L´agencement intérieur reste mystérieux car la destruction fut totale( derniers fidèles voulant empêcher la profanation par les chrétiens ou fanatisme de ces derniers ?) Ici, la Pythie rendit son dernier oracle à l´empereur Julien l´Apostat.
Sur les murs du pronaos étaient gravées des devises telles que « Connais toi toi-même », « Rien de trop », « Supporte et abstiens toi » prônant une morale pragmatique.Le pronaos abritait aussi une statue d´Homère.
– Fonction de la Pythie
Après avoir fait brûler des feuilles de laurier au cœur de la cella, la Pythie puisait de l´eau à la source Cassotis qui coulait dans la crypte du temple , l´adyton,. Assise sur un chaudron recouvert d´un couvercle qui constituait la partie centrale du trépied sacré au dessus de l´omphalos, elle buvait l´eau et mâchait des feuilles de laurier (arbre sacré d´Apollon), puis elle se penchait pour respirer les émanations des profondeurs de la terre et tombait dans un état de transe propice à rendre les oracles. Elle pouvait alors transmettre les réponses du dieu aux questions du consultant dans la pièce voisine. L´adyton que les Anciens considéraient comme la tombe de Python contenait aussi la statue en or d´Apollon et le tombeau de Dionysos. Le trépied établissait le lien avec la mort de Dionysos car les Thyiades parnassiennes avaient recueilli les membres du jeune dieu dans un chaudron. D´autre part Dionysos avait son propre autel dans le temple d´Apollon où il demeurait lorsque Apollon allait passer les 3 mois de l´hiver dans le pays des Hyperboréens.
– Sélection de la Pythie
Initialement choisie parmi les jeunes femmes de Delphes, puis pour s´assurer de leur vertu et de leur chasteté, on fit appel à des femmes de cinquante ans ou plus. Dans les périodes de grande affluence dans le sanctuaire, il y eut jusqu´à trois Pythies, de nouveau une seule à l´époque romaine.
– Rituel du pèlerinage
Le pèlerin arrivait par voie maritime au port de Kyrrha (Itea) ou bien par voie terrestre. Il traversait la vallée du Pleistos, gravissait le flanc de montagne au nord de la vallée pour accéder au temple d´Athena Pronaia où il faisait ses dévotions à Athena et Apollon. Poursuivant son chemin jusqu´à la fontaine Castalie il se livrait aux rites de purification avant de franchir l´agora et de pénétrer dans l´aire sacrée du temenos. Là il suivait la Voie sacrée afin de déposer ses offrandes dans le Trésor de sa nation d´origine(initialement des gâteaux, de l´argent à l´époque classique).
Pour interroger l´oracle, le pèlerin devait s´acquitter d´une taxe (pelanos), faire accomplir un sacrifice sur le grand autel du temple, souvent une chèvre, condition obligatoire pour accéder au temple. Là le prêtre étudiait le comportement de l´animal, ce qui déterminait la poursuite ou l´ajournement de la consultation.Le consultant passait alors dans l´oikos, la salle d´attente jouxtant l´adyton où officiait la Pythie.Les femmes n´étaient pas admises. L´ordre de passage était tiré au sort.
– Calendrier
Primitivement le dieu n´était consultable qu´une fois par an, le huitième mois de l´année (février-mars), puis en tous temps ; au IIè siècle une fois par mois. En cas d´urgence (menace de guerre, grande affluence,etc) la disponibilité était totale sauf pendant l´hiver où Apollon était absent.
A l´extrémité du mur nord l´ischegaon datant du IVè siècle fut découvert l´Aurige datant du IV è siècle av JC (au Musée) à l´emplacement de l´ex-voto de Polyzalos
A côté, l´ex-voto de Krateros (320 av JC) commémore son exploit : il sauva Alexandre de la mort lors d´une chasse au lion.
La Voie sacrée fait alors un coude sur la droite et continue de monter jusqu´au théâtre.
4°- LE THEATRE
A l´angle N-O du temenos, il fut construit au IVè siècle av JC, restauré aux frais d´un roi de Pergame Eumène II en 159. Les gradins en pierre blanche du Parnasse pouvaient accueillir 5000 spectateurs pendant les fêtes delphiques, notamment celles données à l´occasion des Jeux Pythiques pour célébrer la victoire d´Apollon sur le serpent Python.
Les Jeux Pythiques eurent d´abord lieu tous les huit ans, puis à partir de 500, tous les quatre ans, de nouveau tous les huit ans à l´époque impériale au début de septembre sous la surveillance des Amphictions. Il s´agissait de représentants des tribus hellènes ancestrales, et non pas de cités, tels que les Doriens, les Ioniens, les Thessaliens, les Phocidiens etc, assurant la protection, l´intendance et l´administration du sanctuaire.
La fête comportait des sacrifices, un drame sacré opposant Apollon à Python, puis un concours musical (cithare, flûte, chants) en l´honneur du dieu. S´ajoutèrent ultérieurement des représentations théâtrales (tragédies, comédies). Il y avait aussi des jeux gymniques dans le stade et des cour
ses de chars dans l´hippodrome de la plaine. Les récompenses étaient des couronnes de laurier.
C) AU NIVEAU SUPERIEUR
1°- LE STADE
Il se situe au N-O du sanctuaire d´Apollon, mais en dehors du périmètre sacré du temenos. Son aménagement date du IIIè siècle av JC. Les gradins de terre soutenus au sud par un mur en appareil polygonal furent remplacés au IIè siècle apr JC par des gradins en pierre sous Hérode Atticus qui y ajouta une porte monumentale à l´extrémité est. Les gradins du côté nord étaient intégrés à la roche. Le stade pouvait accueillir 6500 à 7000 personnes. Une tribune rectangulaire aux bancs à dossiers servait à la présidence des jeux. La piste était longue de 177m,50 sur environ 26m de large.
IV. LA PERENNITE DE DELPHES, SON RAYONNEMENT & SON DECLIN
A l´origine Krissa, ville des Phocidiens dont dépendait le port de Kirrha où débarquaient les pèlerins voulait s´imposer à Delphes. Alors le clergé de Delphes fit appel à une coalition d´états grecs pour la libération de l´oracle en 590 av JC. La guerre sacrée de 600 à 590 se conclut par la destruction de Krissa et la défaite des Phocidiens. Delphes fut libérée et put garantir ainsi la consécration de son territoire à Apollon.
Sa protection était assurée par l´Amphictionie ou confédération religieuse de représentants des douze peuples grecs. Cette confédération se réunissait aux Thermopyles (Anthela) et à Delphes au printemps et en automne avec les autorités en charge de l´intendance du sanctuaire et des Jeux Pythiques qui désormais avaient lieu tous les 4 ans. En 582 av JC par exemple, on décida d´introduire de nouvelles épreuves comme les courses de chars.
La gestion du sanctuaire incombait au Collège amphictionique ayant pouvoir de décision auprès des autorités de la ville de Delphes dépositaires de la fortune du dieu qui encaissaient les recettes. Même des souverains étrangers, comme les rois de Lydie (Asie Mineure) Gygès et Crésus (VIè siècle av JC) firent de riches offrandes au sanctuaire.
Lors de la destruction du temple d´Apollon en 548av JC on fit appel à une souscription internationale qui permit la reconstruction du deuxième temple dit des Alcméonides (514-513)
Au Vè siècle lors des invasions de Darius et de Xerxès le centre de Delphes afficha sa neutralité vis à vis des envahisseurs afin de se préserver du pillage. Delphes tenta de poursuivre cette politique neutre pendant la période de rivalité entre cités comme Athènes et Sparte et les offrandes continuèrent d´affluer.
Suite à l´intervention de Périclès en 448 pour restituer l´oracle aux Phocidiens, la deuxième Guerre Sacrée rendit son autonomie à Delphes en 449.
Au IV è siècle en 357 les Phocidiens furent condamnés à payer une amende pour avoir cultivé la plaine sacrée. La troisième Guerre Sacrée eut lieu de 356 à 346. Les Phocidiens pillèrent le trésor sacré. Delphes appela Philippe de Macédoine à la rescousse. En 352 les Macédoniens chassèrent les Phocidiens et participèrent au Conseil Amphictionique.
La quatrième Guerre Sacrée se déroula de 339 à 338 contre les Amphisséens coupables d´avoir également cultivé la plaine sacrée. L´Amphictionie ayant de nouveau eu recours à
Philippe de Macédoine celui ci en profita pour s´emparer de la Grèce.
Au IIIè siècle les Etoliens remplacèrent les Macédoniens dans la mainmise sur le sanctuaire et mirent fin aux incursions gauloises en 279 av JC. Ils furent aussi à l´origine d´une nouvelle fête annuelle les soteria en l´honneur d´Apollon.
Puis les Romains à leur tour chassèrent les Etoliens en 191 et la ville passa sous tutelle romaine. L´oracle perdit de sa crédibilité à cette époque.
En 109 av JC Mincius Rufus repoussa une invasion de Gaulois et de Thraces, mais en 91 ces derniers incendièrent le temple. En 86 Sylla pilla le sanctuaire.
Sous les empereurs romains il y eut un renouveau du culte et du lieu sacré grâce à Auguste qui relança l´Amphictionie, aux empereurs Hadrien et Hérode Atticus, et aux Antonins dont les dons furent généreux. En revanche Néron dépouilla le sanctuaire de 500 statues.
Par la suite Delphes perdit sa place de centre du monde (omphalos) face au scepticisme (Lucien) et Constantin par exemple ne cessa d´enrichir sa capitale Constantinople en pillant le site de Delphes.
CONCLUSION
Par sa situation géographique d´exception sur le site imposant des Roches Phédriennes, Delphes a certainement inspiré la mythologie primitive de la Terre-Mère, puis le choix des Grecs depuis le VIIè “ VIè siècle av JC d´y installer l´aire sacrée dédiée au culte d´Apollon, d´Athena et de Dionysos.
La création de l´Amphictionie, ce Conseil regroupant des représentants des 12 peuples grecs originels permit à Delphes de se protéger contre les dangers d´un éclatement ou d´une destruction prématurée due aux rivalités entre cités toute puissantes.
Enfin la popularité de l´oracle d´Apollon Pythien ne fut pas démentie pendant plus de six siècles et se propagea jusqu´en Asie Mineure et jusqu´à Rome.
La richesse et le foisonnement des ex-voto des trésors et les vestiges des temples d´Athena Pronaia et d´Apollon dont certains exemples représentatifs sont exposés au musée, démontrent le raffinement et la perfection atteinte par les artistes sculpteurs et les architectes.
Cette juxtaposition des monuments d´époques diverses est un véritable kaléidoscope de l´histoire de l´antiquité grecque. C´est aussi l´affirmation de rivalités politiques où chaque cité se devait d´exposer sa puissance par rapport à ses concurrentes en l´emportant sur le plan architectural en un lieu considéré comme le centre du monde.
FICHE – Le sanctuaire et l’oracle d’Apollon à DELPHES – Jean-Pierre Masson pour Latine Loquere
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