La conquête de l’Hispanie par les Romains

La conquête de l’Hispanie par les Romains

texte : Jean-Claude Daumas pour “Arrête ton char !”

Source principale : François HINARD (sld) HISTOIRE ROMAINE, tome 1, Fayard, 2000, 1075 p.

 

Moins connue que celle de la Gaule qui a fut réalisée en 2 fois [1) 125-121 avant J.-C. pour la Gaule du Sud Est (future Narbonnaise) : Roussillon, Languedoc et du Rhône aux Alpes ; 2) 58-50 avant- J.-C. pour le reste de la Gaule par Jules César qui l’a racontée et magnifiée dans son livre sur La guerre des Gaules], la conquête de l’Hispanie fut longue (2 siècles) et difficile : beaucoup de morts des deux côtés.

 

I. UN LEG de la SECONDE GUERRE PUNIQUE (218-207)

– 227 : Rome prend le contrôle des territoires, surtout côtiers, au nord de l’Ebre (traité avec Carthage).

– 218 : Hannibal s’empare de Sagonte, cité sous la protection de Rome : c’est le départ de la Seconde Guerre punique (218-201).

– 217 : Arrivée en Hispanie de Publius et de Cnaeius Cornelius Scipio ; ils occupent Sagonte en – 212 mais sont battus et tués en – 211 par les Carthaginois.

– 209 : le fils de Publius (futur Scipion l’Africain) prend Carthagène, la capitale punique.

– 208 : il est victorieux d’Hasdrubal près de Baecula mais il ne peut empêcher l’armée punique, à peu près intacte, de partir pour l’Italie en renfort des troupes d’Hannibal.

– 207 : victoire décisive de Scipion sur Magon (le plus jeune des Barcides) à Ilipa ; Scipion n’aura mis que 3 ans pour chasser les Carthaginois d’Hispanie. Au secteur septentrional déjà sous domination romaine, s’ajoute désormais un vaste espace méridional riche en minerais et productions agricoles.

– 206 : fondation d’Italica (près de Séville/Hispalis), 1ère colonie romaine en Hispanie où s’installent les vétérans de Scipion.

– 197 : création de 2 provinces romaines administrées par des préteurs : au nord de Carthagène reconstruite, la Citérieure (Hispania Citerior) ; au sud, l’Ultérieure (Hispania Ulterior).

 

II. DEUX TIERS DE SIECLE D’AFFRONTEMENTS MEURTRIERS (196-133)

1) 18 ans de lutte indécise (197-179)

– 196 et -195 : le consul Marcus Porcius Caton vient à bout de la révolte des Turdétans montagnards entre Guadiana (Anas) et Guadalquivir (Baetis) qui s’était ensuite étendue à la Citérieure où le préteur Caius Sempronius Tuditanus avait été battu et tué.

– 194 à – 179 : 15 ans d’affrontements contre les Celtibères et/ou les Lusitaniens aux résultats contrastés :

– 190 : lourde défaite de Lucius Aemilius Paullus.

– 187 : «  «  Caius Atinius qui meurt de ses blessures.

– 181 : Fulvius Flaccus dévaste la Citérieure celtibère.

– 179 : Tiberius Sempronius Gracchus (le père des Gracques) remporte une victoire décisive qui permet la signature d’un traité de paix pour 20 ans avec les Celtibères.

2) 25 ans de paix (sabotée par les Romains ?) de – 179 à – 154

Importante immigration en Hispanie d’Italiens attirés par les minerais métalliques à exploiter, accompagnée par des exactions (terres confisquées, butin prélevé), des brutalités, jamais sanctionnées par les gouverneurs romains complices, d’où une reprise de la guerre en – 154.

3) 20 ans de résistance héroïque (153-133)

– 153 : les Lusitaniens vainqueurs du préteur Lucius Mummius et les Celtibères attaquent Quintus Fulius Nobilior.

Alternance de bons chefs militaires comme Marcellus le Jeune (un modéré) en – 151 et d’autres, arrogants et cruels, comme en – 150 Servius Sulpicius Galba qui massacre des Lusitaniens inoffensifs. Ce qui entraîne la révolte de leurs compatriotes sous le commandement du pâtre Viriathe – un des rescapés du massacre. Viriathe se révèle chef militaire et tient en échec les Romains de – 147 à – 139. Il repousse Caius Veturius en – 147, puis Caius Plautius, Claudius Unimanus et Caius Nigidius.

– 145/144 : Viriathe battu pour la première fois près de Baecula par Quintus Fabius Maximus, fils de Paul Emile et frère de Scipion Emilien, demande l’aide des Celtibères. Ces derniers l’emportent en – 140 sur le proconsul Quintus Fabius Maximus Semilianus et concluent une paix avec lui.

– 139 : Viriathe est assassiné par des Lusitaniens soudoyés par Rome ; les Lusitaniens se rendent mais les Celtibères continuent la lutte

4) Le siège de Numance (- 134/133)

– 137 : Numance, capitale des Celtibères, est attaquée mais les Romains du consul Caius Hostilius Maximus, encerclés, doivent se rendre.

– 134 : Scipion Emilien, le vainqueur de Carthage, entouré d’un état major prestigieux (Marius, Jugurtha, Polybe, …), est envoyé d’urgence. Il rétablit la discipline et le moral des Romains qui alors, assiègent Numance à l’aide de gigantesques travaux de poliorcétique : cours d’eau détourné, fossés, palissades, tours de guet. Numance résiste 8 mois avant de se rendre (- 133) : la ville est pillée, incendiée, rasée jusqu’au sol et sa population réduite en esclavage.

Pendant des années, 8 000 Celtibères auront tenu tête à 30 000 Romains.

 

III. LES GUERRES CIVILES ROMAINES SUR LE TERRITOIRE HISPANIQUE (80-45)

1) – 80 à -72 : Sertorius : meilleur lieutenant de Marius, il a fui en Hispanie où il a beaucoup d’amis, créant un véritable Etat romain appuyé par certains peuples ibériques.

– 79/78 : il est vainqueur des proconsuls de Citérieure puis d’Ultérieure

– 76 : arrivée de Pompée avec 60 000 hommes.

– 75 : Pompée s’empare de Valence et Sertorius se réfugie en Lusitanie.

– 74 : 2 légions de plus pour Pompée qui pacifie les deux provinces.

– 72 : Sertorius assassiné ; son successeur Peperna est capturé.

2) – 49 à – 45 : Pompéiens contre Césariens :

– 49 : Pompée avec 7 légions (5 en Citérieure, 2 en Ultérieure) fait face à César arrivant avec aussi 7 légions et l’appui des peuples du nord-est. L’armée pompéienne capitule à Ilerda (Lerida) le 2 août et César, le 7 septembre, préside une réunion des chefs des cités à Cordoba.

– 46 : il y a toujours une armée pompéienne en Hispanie (10 médiocres légions et de 3 bonnes) commandée par Labiénus et les 2 fils de Pompée qui avait été assassiné 2 ans auparavant en Egypte. César arrive avec 8 légions et, après une brève campagne (décembre 46-mars 45), il écrase les Pompéiens (33 000 morts) à Munda (près de Cordoue) le 17 mars. César punit, récompense (droit de cité), installe une colonie de vétérans et citoyens pauvres à Corduba et à Hispalis (Séville) qui deviennent colonia julia.

 

IV. L’ACHEVEMENT DE LA CONQUÊTE (- 26 à -19)

Restait alors hors de l’emprise romaine non pas « un village peuplé d’irréductibles Ibères » mais la lointaine chaîne de montagnes du nord, peuplée de Cantabres et d’Astures.

– 26 : Auguste est présent dans l’armée romaine qui attaque les monts cantabriques.

– 26/25 : Auguste, très malade, passe l’hiver à Tarragone avant de gagner Rome.

La brutalité des légats pousse à bout les Astures et les Cantabres et il faut l’intervention en – 19  d’Agrippa en personne pour parachever par une campagne acharnée une conquête qui fut laborieuse (7 ans), les derniers montagnards résistants préférant se suicider plutôt que d’être réduits en esclavage.

 

En – 16/13, lors du second voyage d’Auguste en Occident, l’Hispanie est divisée en 3 provinces : une sénatoriale – la Bétique – preuve qu’elle déjà largement romanisée, et deux impériales avec, au lendemain de la conquête des montagnes du nord, 5 légions, rapidement réduites à une seule stationnée à Léon.

2000px-Conquista_Hispania

 

source de la carte : http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Conquista_Hispania.svg

A propos Robert Delord

Enseignant Lettres Classiques (Acad. Grenoble) Auteur - Conférencier - Formateur : Antiquité et culture populaire - Président de l'association "Arrête ton char !" - Organisateur du Prix Littérature Jeunesse Antiquité

Laisser un commentaire

X